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composaient ce qu’il appelait sa famille militaire. — Toujours confiant dans sa fortune et les ressources de son génie, il ne suit les négociations qu’afin de faire prendre le change à ses ennemis sur les projets qu’il médite. Il espère toujours qu’une grande et belle victoire lui redonnera la prépondérance dont il jouissait autrefois. Ainsi donc, en congédiant le duc de Vicence, il lui dit : « Pendant que vous négocierez à Paris, je leur tomberai dessus avec mes braves. Je pars demain. » Son nouveau plan de campagne était, ou de manœuvrer autour de la capitale, ou de se porter au delà de la Loire. Ce dernier projet avait prévalu dans le conseil. Le 3 avril, jour de la déclaration du Sénat, Napoléon avait passé la revue de sa garde et lui avait dit : « L’ennemi nous a dérobé trois marches et s’est rendu maître de Paris : il faut l’en chasser. D’indignes Français, des émigrés, auxquels nous avions pardonné, ont arboré la cocarde blanche, les lâches ! ils recevront le prix de ce nouvel attentat. Jurons de vaincre ou de mourir pour cette cocarde tricolore qui, depuis vingt ans, nous trouve dans le chemin de la gloire et de l’honneur. » Ce serment fut prêté avec enthousiasme. Pendant toute la soirée, les soldats se livrèrent à des danses bruyantes et joyeuses, en criant : « Vive l’Empereur ! marchons à Paris ! » Napoléon, en effet, bien décidé à reprendre celte ville, avait désigné Moulignon pour son nouveau quartier général. Le 4 avril, l’armée se mit en mouvement pour aller occuper cette position. Le même jour, les plénipotentiaires de Napoléon4 se mettent en route pour Paris, arrivent à Essonne, et descendent chez le maréchal Marmont, qui les retient à dîner. Bientôt Marmont confie à Ney et à Macdonald qu’il a traité avec le prince de Schwartzenberg, mais il leur affirme qu’il n’a point encore signé : c’était un mensonge, car la ratification de sa convention avec le généralissime autrichien avait eu lieu le matin à Chevilly. Cependant il se décide à accompagner les plénipotentiaires à Paris.

Tous les quatre sont admis, à une heure du matin, auprès de l’empereur Alexandre, qui les ajourna à midi.

Ils étaient réunis à onze heures et demie chez le maréchal Ney, attendant le moment de revoir Alexandre, lorsqu’on vint avertir Marmont que son premier aide-de-camp, le colonel Fabvier, demandait à lui parler. Il sortit et rentra presque aussitôt, pâle comme la mort, en s’écriant : « Souham et Bordesoulle ont enlevé mon corps d’armée, Fabvier est venu en toute hâte. » On fit entrer Fabvier afin d’entendre de lui le récit de l’événement.

Cette défection qui, suivant le maréchal Marmont, se fit malgré ses ordres, servit de prétexte à l’empereur Alexandre pour tenir ce discours aux plénipotentiaires : « Messieurs, vous faites sonner bien haut la volonté de l’armée, et vous n’ignorez pas que le corps du due de Raguse a passé de notre côté ; d’autres sont encore dans les mêmes dispositions. On est las de la guerre. L’empereur Napoléon n’a point voulu la paix. Chacun sait qu’il n’y a point de repos à espérer de lui. Les Souverains ont déclaré qu’ils ne voulaient pas traiter avec lui. Nous ne voulons aujourd’hui que ce que le vœu national a déjà proclamé. Il repousse la régence, comme il a repoussé l’empereur Napoléon. Je vous déclare donc que nous ne pouvons admettre que son abdication absolue. — Les plénipotentiaires indignés de cette détermination, repoussent avec énergie la conséquence que tirait l’empereur Alexandre