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au premier Consul la libre disposition de la Toscane. Cette paix de Lunéville produisit en France la plus grande satisfaction ; à la nouvelle qui en fut répandue, le peuple de Paris se porta aux Tuileries, aux cris mille fois répétés de vive Bonaparte ! Il ne se faisait rien alors de grand et d’utile qui ne fût réputé son ouvrage. On lui fit l’honneur d’avoir, de son propre mouvement, décrété des expositions publiques des produits de l’industrie ; on assure que ce fut Chaptal qui lui suggéra cette idée.

À travers une multitude de mouvements de guerre et d’intrigues politiques qui ne laisseront aucun souvenir de quelque durée, nous arrivons à l’époque du Concordat. Bonaparte, bien certain de tenir en main toutes les forces matérielles du pouvoir suprême, comprit, en politique habile, que la solidité de sa puissance avait besoin d’être corroborée par le prestige des idées et des cérémonies religieuses ; la France était alors, et non sans de bonnes raisons, considérée par les étrangers comme la plus impie des nations. Afin de la réconcilier avec le ciel et avec les peuples de l’Europe, le premier Consul commença d’abord par rétablir le pape dans tous ses droits et dignités, après quoi il conclut avec la cour de Rome un concordat par lequel l’Église de France fut rétablie, et, tout en conservant ses libertés, reconnut le souverain pontife pour son chef.

Ce traité, conclu à Paris le 13 juillet, devint loi de l’État le 8 du mois d’avril suivant. Le concordat fut, pour la France, une véritable restauration : reçu avec les plus vives démonstrations de joie par tout ce qu’il y avait d’honnête, de religieux, il renfermait implicitement la condamnation des excès révolutionnaires, donnait à la politique extérieure un gage de confiance et de stabilité ; il groupait enfin, autour du premier Consul, un grand nombre de familles nobles, qui, malgré ses victoires, auraient continué à renier la révolution.

Tout prospérait, l’induslrie, la puissance, la politique. La paix tant désirée avec l’Angleterre fut convenue à Loudun le 1er octobre, et définitivement conclue à Amiens le 25 mars 1802. Si cette paix fut de courte durée, la cause en est due à l’Angleterre. Cette puissance n’ayant point tardé à reconnaître qu’elle avait ’perdu la prépondérance de son commerce par la concurrence du continent, et, voulant la reconquérir à tout prix, elle souleva des difficultés lorsqu’il s’agit de l’exécution du traité. Elle fit demander, d’abord, la reddition de l’île d’Elbe, du Piémont, des États de Parme, qui venaient d’être réunis à la France, et ensuite, mais plus impérieusement, par lord Vithworth, et comme ultimatum, la possession pendant dix ans de l’île de Malte, déclarée indépendante par le traité, la cession de l’île de Lampedouse, l’évacuation de la Hollande par les troupes françaises. Ces propositions furent rejetées. L’ambassadeur quitta Paris le 13 mai 1802, et le 22 l’Angleterre reprit les armes pour ne les déposer qu’après la ruine complète de son rival.

Ce fut sous le consulat qu’eut lieu la funeste expédition de Saint-Domingue, commandée par le général Leclerc, beau-frère de Bonaparte ; le rétablissement des solennités religieuses, ordonnées par le gouvernement ; l’institution de l’ordre de la Légion d’honneur ; le sénatus-consulte, corroboré par le vœu de 3.368.259 voix, qui déclare Bonaparte consul à vie ; la vente de la Lousiane aux États-Unis pour la somme de 15 millions de dollars ; la conspiration dite de Moreau, l’exil de ce général ; la mort du dernier rejeton de la famille des Condés ; la réduction des membres du tribunat, de cent à cinquante.