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a été bâtie par Alexandre. Nous trouverons à chaque pas de grands souvenirs dignes d’exciter l’émulation des Français. »

Menou, qui devait sortir le dernier de l’Égypte, y prend terre le premier. Bonaparte et Kléber débarquent ensemble et le joignent dans la nuit au Marabou, sur lequel fut planté en Afrique le premier drapeau tricolore. Le général en chef, instruit qu’Alexandrie a l’intention de lui opposer de la résistance, se hâte de débarquer, et à deux heures du matin, il se met en marche sur trois colonnes, arrive à l’improviste sous les murs de la place, ordonne l’assaut ; l’ennemi cède et fuit. Nos soldats, malgré l’ordre de leur chef, se précipitent dans la ville, qui n’a pas le temps de capituler et se rend à discrétion.

Une fois maître de cette capitale, et avant de pénétrer plus avant sur le sol égyptien, le vainqueur adressa le 1er juillet cette proclamation aux habitants musulmans d’Alexandrie :

« Depuis trop longtemps les beys qui gouvernent l’Égypte insultent à la nation française et couvrent ses négociants d’avanies. L’heure de leur châtiment est arrivée. Depuis trop longtemps ce ramassis d’esclaves, achetés dans le Caucase et la Géorgie, tyrannise la plus belle partie du monde ; mais Dieu, de qui dépend tout, a ordonné que leur empire finisse. Peuple de l’Égypte, on vous dira que je viens pour détruire votre religion, ne le croyez pas ; répondez que je viens vous restituer vos droits, punir les usurpateurs, et que je respecte Dieu, son prophète et le Coran plus que les Mamelucks. Dites-leur que tous les hommes sont égaux devant Dieu ; la sagesse, les talents, les vertus mettent seuls delà différence entre eux… Y a-t-il une plus belle terre ? elle appartient aux Mamelucks. Si l’Égypte est leur ferme, qu’ils montrent le bail que Dieu leur en a fait… Cadis, cheiks, imans, tchorbadjis, dites au peuple que nous sommes aussi de vrais musulmans. N’est-ce pas nous qui avons détruit les chevaliers de Malte ? N’est-ce pas nous qui avons détruit le pape qui disait qu’il fallait faire la guerre aux musulmans ? N’est-ce pas nous qui avons été dans tous les temps les amis du Grand-Seigneur et les ennemis de ses ennemis ?… Trois fois heureux ceux qui seront avec nous ! ils prospéreront dans leur fortune et dans leur rang. Heureux ceux qui seront neutres ! ils auront le temps de nous connaître, et ils se rangeront avec nous. Mais malheur, trois fois malheur à ceux qui s’armeront pour les Mamelucks et qui combattent contre nous ! il n’y aura pas d’espérance pour eux, ils périront. »

Lorsque tout est complètement débarqué, l’amiral Brueys reçoit ordre de conduire la flotte dans le mouillage d’Aboukir. Quant à l’escadre, elle doit ou entrer dans le vieux port d’Alexandrie, si cela se peut, ou bien se rendre à Corfou. L’arrivée indubitable des Anglais, qui déjà s’étaient montrés dans les parages d’Alexandrie vingt-quatre heures avant l’arrivée des Français, rendaient ces précautions nécessaires. Il était de la plus grande prudence d’éviter les chances d’un combat naval : une défaite pouvait avoir les suites les plus désastreuses sous tant de rapports ; il était encore du plus grand intérêt de marcher au plus vite sur le Caire, afin d’effrayer les chefs des ennemis et de les surprendre avant qu’ils eussent pris toutes leurs mesures de défense.

Desaix se met en route avec sa division et 2 pièces de campagne ; il arrive, à travers le désert, le 18 messidor, à Demenhour, à quinze lieues d’Alexandrie. Bonaparte, en quittant cette dernière ville, en laisse le commandement à Kléber. Le