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fort Malbosuet, ce qui fit dire à Bonaparte, parlant aux généraux : Demain ou après-demain vous souperez dans Toulon. Il devina juste, l’armée républicaine entra dans la place le lendemain.

Le 20 du même mois (30 frimaire an II), les représentants du peuple nommèrent provisoirement le chef de bataillon d’artilierie, Bonaparte, au grade de général de brigade d’artillerie.

Dans le rapport que le général en chef Dugommier envoya à la Convention, à la suite de la prise de Toulon, il est dit au sujet de Bonaparte : « Récompensez et avancez ce jeune homme ; car si on était ingrat envers lui, il s’avancerait tout seul. »

Le 30 décembre 1793, Bonaparte, accompagné de son aide-de-camp Junot, se rendit à Marseille, où il trouva sa famille. Pendant son séjour dans cette ville, il eut occasion de consulter une diseuse de bonne aventure. La sorcière, qui ignorait son grade, lui dit mot à mot et avec assurance : Vous passerez les mers, vous serez victorieux, vous reviendrez, et vous serez plus grand que jamais.

Vers la fin de janvier 1794, Napoléon inspecta les côtes de la mer que baigne le territoire de Marseille pour reconnaître les positions où il serait convenable d’établir des batteries.

Le 16 février de la même année, le représentant du peuple Maignet aurait écrit de Marseille, au comité de salut public, une lettre dans laquelle il lui dénonçait le général Bonaparte, l’accusant de lui avoir proposé, à lui Maignet, de faire réparer les forts Saint-Nicolas et Saint-Jean, que, d’après les ordres de Louis XIV, on avait autrefois élevés autour de Marseille, dans l’intention de les mettre à l’abri d’un coup de main de la population de la ville : ces forts, démolis en partie en 89, contenaient des poudres et des armes de guerre.

À quelque temps de là, Bonaparte fut mandé à la barre de la Convention, mais il était déjà à l’armée ; et les représentants du peuple qui se trouvaient sur les lieux accueillirent favorablement sa justification : le mandat d’amener fut suspendu, sauf à le faire valoir plus tard.

Au printemps de 1794, Napoléon fit venir sa famille au château de Sallé, à un quart de lieue d’Antibes. Un jour il s’y rendit de Nice ; plus préoccupé que de coutume, et se promenant entre ses frères Joseph et Lucien, il leur dit qu’il ne dépendait que de lui de les établir tous avantageusement à Paris. On m’offre, ajouta-t-il, le commandement de la force armée de cette ville, qui est aujourd’hui sous les ordres de Henriot. Qu’en pensez-vous ? Les deux frères gardaient le silence. Cela vaut bien la peine d’y penser. Il n’est pas si facile de sauver sa tête à Paris que dans ce pays-ci. Moi, servir Robespierre ! jamais. Il n’y a de place honorable pour moi qu’à l’armée… Prenez patience, je commanderai à Paris plus tard.

Après le 9 thermidor (27 juillet 1794), les représentants du peuple Albitte, Salicetti et La Porte, écrivent au comité de salut public qu’ils vont s’assurer du général Bonaparte ; qu’ils l’enverront à Paris avec ses papiers…

On prétend que ces proconsuls accusaient le général d’avoir eu les rapports les plus intimes avec les frères Robespierre.

Le 12 août, Bonaparte est arrêté à Nice et mis d’abord au secret. Le 24 du même mois, Salicetti et Albitte informent le comité de salut public qu’ils ont fait remettre Bonaparte en liberté, sans cependant l’avoir réintégré.

Il ne tarda pas à l’être, puisqu’on le revoit en septembre, exerçant les fonctions de commandant en chef de l’artillerie à l’armée d’Italie.