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plus entier plaisir que je vous confierai toujours tout ce que je fais et tout ce que je pense. J’aimerai mieux me faire gronder, plutôt que de vous cacher quelque chose.

Il fait bien beau, de ce temps-ci, et nous pensons, Marie-Louise et moi, au plaisir que nous aurions si vous étiez là pour partager nos longues promenades.

En attendant de vous avoir, nous vous désirons.

Recevez donc, avec son cœur, la pensée de

Votre Blanche.


Viennent maintenant les combats et Édouard sera sûr de trouver, après la bataille, quelle qu’en puisse être l’issue, joie et consolation.

On frappe ; c’est Ricard.

Quelles bonnes nouvelles, demande Édouard ?

— Tu crois aux bonnes nouvelles, toi. Tu es heureux. Moi, quand je n’en ai pas de mauvaises, ça me suffit.

— J’en ai eu assez de mauvaises, ces derniers mois, pour en désirer et en espérer, maintenant, de bonnes.

— C’est vrai. Et puis, avec ça, tu es d’un optimisme !… Je voudrais être comme toi.

— Alors, tu n’as rien de neuf ?

— Non ; je travaille un peu ; mais je n’ai encore aucune position fixe et définitive. Je me demande si je pratiquerai le droit.

— Tu ne serais pas le premier qui, une fois reçu, ait embrassé une autre carrière.

— Le journalisme me tenterait assez, si le niveau en était plus relevé qu’il ne l’est actuellement.

— Tu pourrais travailler à ce relèvement.

— Ce serait une belle tâche…

Ricard causa ainsi, quelques minutes, puis il dit : à propos, de quoi voulais-tu parler dans ta lettre ?

— Quelle lettre ?

— Celle que tu m’écrivais, à ton arrivée en ville, et dans laquelle tu me disais que tu avais une foule de choses à me dire, et une, entr’autres, toute particulière.

— Ah ! oui ; je voulais justement t’en parler. Tiens, lis.

Et il lui tendait la lettre de Blanche. Ricard lut, en marquant un vif étonnement.

« Je te félicite, mon cher : je ne te savais pas rendu si loin. »

Édouard lui confia alors tout ce qui s’était passé entre lui et Blanche, et lui fit part de ses sentiments.

Ricard écoutait, avec intérêt, mais avec, de temps à autre, une moue un peu décourageante.

— Alors, tu es pris.

— Et je ne chercherai certainement pas à me déprendre.

— Tu connais mes idées, sur ces choses-là !

— Un peu.

— En principe, je n’y crois pas…

— Tu n’es pas encourageant.

— … mais, en pratique, j’admets des exceptions ; je souhaite que tu en aies rencontré une.

— Oh ! tu peux en être certain.

— Alors, je te félicite de nouveau, mon cher. Crois à tout le plaisir que j’éprouve pour toi.

Puisque tu m’as montré cette lettre, dit Ricard, tu ne seras pas surpris que je t’en lise une, à mon tour. Ce n’est pas précisément une lettre d’amour, mais j’espère qu’elle t’intéressera quand même. C’est notre ami Giroux qui m’écrit.

Giroux écrivait :
Mon cher Ricard,

Pardonne-moi d’avoir tardé si longtemps à t’écrire ; mais j’ai été tellement occupé. Tu comprends, avec