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tôt que de s’appeler des commissions royales, de s’appeler des farces royales.

— Qu’est-ce qu’on pense de cela, à Québec ?

— Oh ! on sait bien à quoi s’en tenir. On se demande seulement combien de temps le gouvernement pourra continuer à faire ce jeu.

— Quelle drôle d’histoire. Être élu pour représenter le peuple…

— … Et ne lui faire que de fausses représentations, dit Ricard.

— Je vois que tu n’ajournes pas tout à quarante ans et que tu fais des jeux de mots dès à présent, dit malignement Édouard.

— Que veux-tu ; autant rire quand ça va mal ; autrement il faudrait toujours pleurer, car tout est pourri.

— Sceptique !

— Soit ; admettons qu’il n’y ait que le gouvernement de pourri. C’est bien assez.

— C’est beaucoup trop.

— Eh ! bien, renversons-le.

— Il va tomber tout seul, dit Giroux ; si vous connaissiez les dessous comme moi, vous n’en douteriez pas. C’est impossible, ça ne peut pas durer, s’il y a encore gros comme ça d’honnêteté publique pour mettre fin à ces scandales et à ce règne de sans-patriotismes et de sans-consciences.

— J’ai hâte de voir la prochaine session, dit Édouard.

— Il va y en avoir des protestations des modérés, et des mensonges et des abus de pouvoir, de la part des ministériels, répondit Ricard.

Il se faisait tard.

Giroux et Ricard, fatigués du voyage, prirent donc congé d’Édouard, qui fit promettre à Giroux de revenir le voir quand il reviendrait en ville, et dit au revoir à Ricard.



CHAPITRE XIX.

Sur la pente


Pendant que le père d’Édouard mourait et que lui-même, sous l’égide de l’amour, au matin de la vie, les yeux levés vers l’idéal, commençait résolument la journée de l’existence, les événements marchaient aussi dans le monde politique.

La lutte devenait de plus en plus ardente entre Ollivier, appuyé par les modérés et grand nombre des radicaux, et le parti radical ministériel.

Les journaux faisaient rage.

« L’Indépendant » faisait une guerre à mort à Ollivier — en dépit de toute sa prétendue indépendance — et le « Matin », l’organe ministériel avait, sur son compte, des articles stupéfiants par leur mauvaise foi et leur ineptie.

Édouard était à parcourir ces journaux et passait, dans son esprit, condamnation sur de semblables procédés.

On ne tentait guère de réfuter les accusations qu’Ollivier portait contre le gouvernement : c’eût été trop difficile. On s’en prenait à Ollivier lui-même et on tâchait, en l’amoindrissant, d’arrêter le succès de sa campagne.

Le stratagème manquait heureusement son effet, car ces personnalités tombaient à faux et les mensonges des journaux radicaux étaient vite démasqués par la « Justice », dont le tirage, signe de la faveur du peuple, augmentait rapidement, tandis que celui des feuilles opposées décroissait aussi rapidement, surtout celui du « Matin, » qui n’était plus que de la moitié de la circulation de la « Justice. »

On protestait que les accusations d’Ollivier étaient fausses, quand elles étaient appuyées sur les documents publics et les faits et irréfutablement confirmées par l’éclatante démission de Ravaut.