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L’ENVERS DU JOURNALISME

templant malgré lui une tache causée par l’infiltration de l’eau venant du toît, tache que son propriétaire avait négligé de faire disparaître. Il lui semblait que cette tache prenait mille formes diverses et bizarres, comme les nuages que l’on contemple, couché sur le dos dans l’herbe odorante et les yeux au ciel, dans les campagnes. — Hélas, la campagne et l’herbe verte étaient fort loin, et il ne voyait de ciel, par sa fenêtre, qu’un tout petit coin avec de gros toîts.

Le quatrième jour, il put se lever ; le lundi qui suivit, il retourna au journal. Son absence n’avait apparemment pas été remarquée. Il pensa avec amertume qu’il n’était pas grand chose, après tout, qu’il n’était qu’un infime rouage dans une machine et qu’elle pouvait marcher sans lui.

Il se mit à travailler, s’efforçant de s’absorber dans son ouvrage et de s’oublier lui-même avec ses dégoûts et ses rancœurs.

Il s’aperçut que le pupitre voisin du sien était vide. « Où est Labrie, » demanda-t-il à un reporter ? — C’était le nom de son voisin, un jeune étudiant entré depuis peu au journal.

— Comment, lui répondit son camarade, tu ne sais pas ?… C’est vrai, tu as été absent.

— Qu’est-ce qu’il a eu ?

— Il est mort.

— Mort !

— Oui. Il a pris du froid. Il a attrapé une péritonite, qui l’a emporté en trois jours.

Martin baissa la, tête et continua à travailler. Le city editor lui apporta alors une feuille cou-