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L’ENVERS DU JOURNALISME

rait été probablement possible, mais le désespoir avait pris possession de Martel. Le long de la route, il mit plusieurs fois la main dans sa poche, puis se passa un doigt sur les lèvres, machinalement, sans affectation aucune.

Il fut conduit au Palais.

Là, on le mit dans les cellules, en attendant la voiture de la prison, car il devait aller y coucher, l’heure étant trop avancée pour le faire comparaître immédiatement devant un magistrat.

Quand on alla le chercher pour le faire monter dans la voiture cellulaire, avec les ivrognes, les bandits et les voyous qui attendaient également d’être transportés à la prison, il était mort…

L’ignoble voiture cellulaire lui fut épargnée et on porta son cadavre à la morgue. Les formalités de l’enquête furent abrégées et le coroner donna immédiatement la permission de faire l’inhumation, car il était évident que Martel s’était suicidé.

L’affaire fut étouffée. Pas un journal n’en parla.

Martin demanda à un officier du bureau du grand connétable si le récit que lui avait fait Dugas était bien exact. L’officier lui dit qu’il ne l’était que trop. On avait trouvé un paquet de poison dans une des poches de Martel. Le papier qui enveloppait ce poison n’était pas défait, mais il était troué, comme si on eût passé les doigts au travers. C’était l’explication des gestes de Martel en se rendant du journal au Palais.

Les policiers avaient été impuissants à empêcher le suicide. Celui qui donna ces détails à Martin lui dit que c’était un des plus tristes événements dont il eût jamais été témoin.