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écroulées. Au centre d’une niche antique, démantelée, dont la base seule résiste encore aux outrages du temps et de l’atmosphère, j’ai mesuré une statue de Bouddha (ou de Gautama, comme on l’appelle ici), fille a dix-huit mètres de hauteur, et parait de bronze au premier coup, d’œil ; mais j’ai constaté que, tout entière maçonnée en brique à l’intérieur, elle était simplement revêtue de plaques d’airain de trois centimètres d’épaisseur. Mgr  Pallegoix prétend que les ruines d’Ajuthia recèlent d’inépuisables trésors et qu’on y fouille toujours avec succès. Selon lui, une seule des statues qui dorment aujourd’hui sous les éboulis des temples antiques avait exigé, pour sa confection, 25,000 livres de cuivre, 2,000 livres d’argent et 400 livres d’or ! Aujourd’hui, le vautour et l’orfraie nichent dans la couche de décombres qui les a ensevelis.

Au centre d’une plaine, à quatre milles environ de la ville, il y a une pyramide sacrée d’une hauteur et d’une largeur immenses ; elle sert en quelque sorte d’asile, et le roi vient encore parfois la visiter. On n’y arrive qu’en bateau ou à dos d’éléphant ; car il n’y a en fait de route, pour aller jusque-là, qu’un canal ou des terrains marécageux. Cet édifice est très-célèbre chez les Siamois à cause de sa hauteur ; mais le seul attrait qu’il puisse avoir pour un étranger, c’est la vue magnifique dont on jouit de son sommet. Ainsi que tous les autres monuments du même genre, celui-ci est composé d’une succession de degrés partant de la base pour arriver au faite ; quelques images mal faites viennent distraire la monotonie de cet édifice de brique. Il n’a aucun de ces ornements de faïence