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ou jeunes filles employées au service du palais. La gouvernante de la maison de la reine est encore chargée de veiller sur les filles du roi et sur toutes les princesses, qui sont comme cloîtrées et ne peuvent jamais se marier. Toute cette troupe de femmes passent leur vie dans la triple enceinte de murs où elles sont enfermées, et ne peuvent sortir que rarement pour aller faire quelques achats ou pour aller porter des offrandes aux pagodes. Toutes, depuis la reine jusqu’aux portières, reçoivent leur solde du roi, qui les entretient, du reste, avec beaucoup de luxe et de générosité. On dit que, dans la troisième enceinte, se trouve un jardin délicieux et fort curieux ; c’est un vaste enclos qui contient en miniature tout ce que l’on trouve en grand dans le monde. Là, il y a des montagnes factices, des bois, des rivières, un lac avec des îlots et des rochers, des petits vaisseaux, des barques, un bazar ou marché tenu par les femmes du palais, des pagodes, des pavillons, des belvédères, des statues, et surtout des arbres à fleurs et à fruits apportés des pays étrangers. Pendant la nuit, ce jardin est illuminé par des lanternes et des lustres ; c’est là que les dames du sérail prennent leur bain et se livrent à toutes sortes de divertissements pour se consoler d’être séquestrées du monde. »

Des portraits photographiés de quelques habitantes de ce gynécée étant aujourd’hui parvenus en Europe, nous devons nous empresser de déclarer qu’ils ont été exécutés sous les yeux du roi, quand ils ne l’ont pas été de sa propre main ; car Sa Majesté, qui ne doit rien ignorer, prétend que l’art des