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qu’on passe en vue de ses portiques, il faut se découvrir ; les premiers fonctionnaires de l’État sont alors tenus de fermer leurs parasols, ou tout au moins de les incliner respectueusement du côté opposé à la demeure sacrée ; les innombrables rameurs des milliers de barques qui montent ou descendent le fleuve doivent s’agenouiller, tête nue, jusqu’à ce qu’ils aient dépassé le pavillon royal, le long duquel des archers, armés d’une sorte d’arc qui décoche fort loin des balles de terre fort dure, se tiennent en sentinelles, pour faire observer la consigne et châtier les délinquants. Ajoutons, comme dernier trait, que ce peuple, toujours à plat ventre, — dont un grand tiers au moins, la moitié peut-être, si l’on eu excepte la colonie chinoise, est esclave de corps et de biens, — se donne à lui-même le nom de Thaie, qui signifie hommes libres !!!

La population du royaume de Siam s’élève, suivant Mgr Pallegoix, à six millions, à quatre et demi seulement, suivant l’Anglais Bowring ; mais, quel que soit son chiffre, elle n’est pas, à beaucoup près, homogène. Une colonie chinoise, très-respectable dans ce pays, en forme au moins un cinquième ; deux autres cinquièmes sont composés de Malais, de Cambodgiens, de Laotiens, de Pégouans, etc. Les Siamois proprement dits comptent donc à peine deux millions. Chaque population a ses usages, ses mœurs à elle ; et, bien, que toutes appartiennent à cette branche du tronc humain que les classificateurs appellent la race mongole, toutes ont un type propre. Les Siamois se reconnaissent sans peine à leurs allures molles et paresseuses, à leur physionomie servile. Ils ont pres-