Page:Mouhot - Voyage dans les royaumes de Siam, de Cambodge, de Laos et autres parties centrales de l'Indo-Chine, éd. Lanoye, 1868.djvu/299

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

geur et d’une profondeur surprenantes, et surtout d’un pittoresque extrême. À la vue d’un décor qui les représenterait avec fidélité, on les croirait l’œuvre d’une riche imagination, et on nierait qu’il soit possible de rien voir d’aussi beau dans la nature. Ces roches, tenues longtemps en fusion, ont pris par le refroidissement ces formes curieuses particulières aux scories et au basalte, puis plus tard la mer se retirant, car tous ces monts ont surgi du sein des eaux, et l’humidité, de la terre continuant à suinter, ces mêmes rochers se sont teints de couleurs si riches, si harmonieuses ; ils se sont ornés de si imposantes, si gracieuses stalactites, dont les hautes et blanches colonnades semblent soutenir les voûtes de ces souterrains, que l’on croit assister à une de ces belles scènes féeriques qui font la fortune des théâtres de Londres et de Paris.

Si le goût de l’architecte qui a construit le palais du roi en ville a échoué à l’intérieur, ici du moins il a tiré le meilleur parti possible de tous les avantages qu’offrait la nature, et heureusement sans leur nuire en rien. Pour peu que le marteau eût touché aux roches, il les eût défigurées ; on n’a donc eu simplement qu’à niveler le sol, et à pratiquer quelques beaux escaliers pour aider à descendre dans l’intérieur des grottes et les faire paraître dans toute leur beauté.

La plus vaste et la plus pittoresque des deux cavernes a été convertie en temple ; elle est bordée sur toute son étendue d’une rangée d’idoles, dont la plus grande, représentant Bouddha dans le sommeil, est toute dorée.