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II

Population de Bangkok. — Les Siamois. — Hommes, femmes, enfants. — Esprit de famille. — Étranges contrastes. — Superstitions.

Bangkok, ville toute moderne, a succédé comme capitale du royaume de Siam à deux autres cités qui, elles-mêmes, ne remontent pas à une haute antiquité : Ajuthia et Nophabury. En héritant de leurs prérogatives, elle a aussi hérité de leurs titres officiels, et tout bon Siamois voit en elle Krung-thépha-maha-nakkom-si-Ayuthaja-maha-dilok-raxathani, c’est-à-dire « la grande ville royale des anges, la belle et inexpugnable cité, etc., etc. » Ces qualifications sont brillantes ; mais sont-elles méritées ? Inexpugnable ! hélas ! Bangkok ne l’est pas plus qu’Ajuthia, qui a été, à plusieurs reprises, prise et pillée par les Pégouans et les Birmans. — Belle ! elle a certainement droit à cette épithète quand, vue du milieu du fleuve, elle étale au regard ses palais et ses temples ; mais elle la perd rapidement dès qu’on pénètre dans les ruelles fangeuses, dans les mille canaux secondaires, étroits et nauséabonds qui dé-