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mettre notre avis, c’est humblement et avec toute réserve.

Ongkor a été le centre, la capitale d’un État riche, puissant et civilisé, et nous ne craignons pas d’être contredit sur ce point par aucun de ceux qui auront étudié ses grands monuments dans nos imparfaites esquisses.

Or, tout État puissant et riche suppose nécessairement une production relativement grande et un commerce étendu. Tout cela pouvait-il réellement exister autrefois au Cambodge ?

À cette première question, nous pouvons répondre avec assurance : Oui ! et tout cela existerait probablement encore, si le pays était gouverné par des lois sages, si le travail et l’agriculture étaient encouragés, honorés, au lieu d’y être méprisés et le peuple pressuré, si le gouvernement n’y exerçait pas un despotisme aussi absolu ; et surtout si, sur ce sol fécond, ne prévalait pas ce malheureux état d’esclavage qui y arrête tout développement, qui place l’homme au niveau de la brute, et qui l’empêche de produire au-delà de ses besoins, car plus il produit, plus il doit payer d’impôts[1].

La terre, dans la plupart de ses provinces anciennes ou actuelles, y est d’une fertilité surprenante ; le riz de la province de Battambâng est d’une qualité supérieure à celui de la basse Cochinchine ; les forêts recèlent partout des gommes précieuses, telles que la gomme-gutte, la gomme-laque, la cardamome et beaucoup d’autres, ainsi que des résines utiles.

  1. Ceci soit dit pour le Cambodge comme pour le Siam, car le premier est tributaire du second.