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— Si vous pouviez rester un jour de plus, vous me feriez plaisir ; demain, vous dînerez chez moi ; le jour suivant, je vous conduirai voir la ville du premier roi, et le soir je ferai jouer la comédie. »

La comédie ! pensai-je, cela doit être curieux ; et pour la comédie je restai. Après avoir remercié le monarque de ses bontés pour moi, nous nous séparâmes avec une poignée de main. Évidemment, j’étais en grande faveur. Le lendemain matin, des pages vinrent m’offrir, de la part du roi, des chevaux pour me promener ; mais la chaleur était accablante. Vers quatre heures, le roi m’envoya un cheval pour me rendre au palais. J’étais en habit, pantalon et gilet de toile d’une blancheur éclatante ; un casque de liège, modèle Romain et recouvert de mousseline blanche selon la méthode anglo-indoue[1], complétait ma singulière toilette. Je fus introduit par le chambellan dans un des appartements particuliers du roi. C’était un très-joli salon, meublé à l’européenne. Sa Majesté m’attendait en fumant un bouri, assise à côté d’une table chargée de mets. Dès que j’entrai, elle se leva, me tendit la main en souriant, et me pria immédiatement de prendre place et de commencer mon repas. Je vis qu’il se proposait, selon l’usage du pays, de me faire honneur en assistant au repas sans y prendre part lui-même. Après m’avoir présenté, avec une aménité et une grâce parfaites, son frère cadet, jeune prince de quatorze à quinze ans, prosterné à côté de lui, le roi ajouta :

  1. Coiffure excessivement légère, fraîche, commode et abritant bien du soleil le cou et la face. Je la recommande fort aux voyageurs dans ces pays.