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amusement, et, lorsqu’ils peuvent se procurer un fusil et un peu de poudre chinoise, ils vont traquer le sanglier, ou attendre le tigre et le daim à l’affût, perchés sur un arbre ou dans une petite hutte qu’ils élèvent sur des pieux de bambou. Leur pauvreté approche de la misère ; mais, comme presque toujours, elle provient de leur excessive paresse, car ils ne cultivent que le riz nécessaire à leur entretien. Cette récolte assurée, ils passent le reste de leur temps à dormir, à flâner dans les bois, à faire de longues courses aux villes et villages voisins, et à se visiter chemin faisant.

À Patawi, j’entendis beaucoup parler de Kôrat, qui est la capitale d’une province du même nom située au nord-est de Pakpriau, à cinq journées de marche de cet endroit (cent ou cent vingt milles) et que j’ai l’intention de visiter plus tard. Il paraît que c’est un pays riche et qui produit surtout beaucoup de soie d’une bonne qualité ; il s’y trouve également et en grande quantité un arbre à caoutchouc ; mais les habitants négligent cette gomme, ignorant sans doute sa valeur. J’en ai rapporté un magnifique échantillon qui a été très-admiré à Bangkok par les négociants anglais. La vie y est, dit-on, d’un bon marché fabuleux. On peut y acheter six poules ou poulets pour un fuang (37 centimes), cent œufs pour le même prix, le reste à proportion. Mais, pour y arriver, il faut traverser pendant cinq ou six jours la vaste et profonde forêt du Roi-du-Feu que l’on voit du sommet de Patawi, et ce n’est que pendant la saison sèche que l’on peut s’y aventurer ; durant celle des pluies, l’eau et l’air y sont mortels. Les