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de chrétiens laotiens dont le bon P. Larnaudie m’avait parlé[1]. Nous amarrâmes notre barque auprès de leur habitation, espérant qu’elle y serait plus en sûreté qu’ailleurs pendant le temps que j’emploierais à l’exploration des montagnes des environs et à visiter Patawi, qui est le pèlerinage des Laotiens, comme Phrâbat est celui des Siamois.

Dans tout le district de Pakpriau, depuis les rives du fleuve, à l’est comme à l’ouest, tout le terrain, jusqu’aux montagnes qui commencent à une distance de huit ou dix milles, ainsi que sur toute cette chaîne, du sommet à la base, est couvert de fer hydroxydé et de fragments d’aérolithes ; aussi la végétation y est-elle chétive, et les bambous en forment la plus grande partie ; mais partout où les détritus ont formé une couche d’humus un peu épaisse, elle est au contraire d’une grande richesse et d’une grande variété. Les arbres, hautes et innombrables futaies, fournissent des gommes et des huiles qui seraient précieuses pour le commerce et l’industrie, si l’on pouvait engager les habitants paresseux et insouciants à les recueillir. Les forêts sont infestées de tigres, de léopards et de chats-tigres. Deux chiens et un porc furent enlevés près de la chaumière des chrétiens, gardiens de notre barque, pendant notre séjour à Pakpriau. Le lendemain, j’eus le plaisir de faire payer au léopard le vol commis à ces pauvres gens, et sa peau me sert de natte. Où le sol est humide et sablonneux, je trouvai en grand nombre des traces de ces animaux ; mais celles du tigre royal

  1. Le P. Larnaudie était l’interprète de l’ambassade siamoise qui a visité la France en 1860-1861.