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révolte dans tout son corps. Se redressant sous l’affront, sans même donner d’explications, elle se tenait devant lui, méprisante.

Il revint à la charge, flairant un secret, et lui passant le bras autour de la taille, il l’entraîna au fond de la « bougerie », où ils s’assirent côte à côte, sur une botte de paille.

Pressée de questions, Marthe finit par lui avouer qu’elle venait se cacher là tous les soirs, depuis qu’ils allaient pêcher de ce côté. C’était plus fort qu’elle : elle ne vivait pas, à le sentir sur l’eau par une froidure pareille. Elle se glissait dans ce hangar à la nuit tombante, attendant le moment où ils passaient, heureuse de l’entrevoir un instant, d’entendre le bruit de ses pas sur les pierres du sentier. Et sachant qu’il ne lui était arrivé rien de fâcheux, elle dormait mieux.

Elle continuait : « c’est vrai qu’ils faisaient un dur métier, et on ne vivait pas vieux dans leur famille, à preuve Dominique, tout perclus de « douleurs ».

Elle lui disait ces choses d’une voix basse, un peu tremblante, vaincue par l’émotion. Et elle posa sa tête sur l’épaule du jeune homme, dans un mouvement à la fois câlin et confiant.

Lui la rassurait avec des paroles tendres.

Il faisait bon dans ce coin tiède, pareil au gîte qu’une bête se ménage au creux d’un buisson battu de pluie, en piétinant les herbes. Ils oubliaient le moment qui passe, le souper qui les attendait, savourant la douceur des premiers serments et des minutes éternelles. L’ombre se peuplant autour d’eux de bruits familiers, une impression exquise de recueillement, de