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s’y glissent par les soirs d’automne, et dorment sur des lits de roseaux craquants, près de l’étable d’où s’exhale le souffle des bêtes repues.

Quelque chose remua comme Pierre passait auprès d’un mur.

Posant sa hotte à terre, il s’avança avec précaution, tâtonnant dans l’ombre avec ses mains. La nuit était noire. Un petit cri monta, d’effroi ou de surprise, tandis qu’une forme mince, une silhouette fuyante glissait rapidement dans les ténèbres, cherchant à gagner la porte ouverte sur le jardin.

Pierre l’atteignit. C’était une fille qui se débattait. L’ayant amenée au dehors, il reconnut le visage de Marthe à la clarté douteuse, qui traînait sur les champs assombris.

— Que diable faites-vous là ? demanda-t-il.

L’autre ne répondait pas. Son cœur battait si fort dans sa poitrine que Pierre pouvait l’entendre distinctement. Il ne distinguait pas les traits de son visage, mais un rayon errant se posait sur ses yeux, qui brillaient étrangement, d’un éclat trempé de larmes.

Pierre insista.

Quelle idée d’aller se nicher dans cet endroit par un temps pareil ?

Marthe secouait la tête, avec un embarras visible dans tous ses gestes.

Une supposition traversa l’esprit de Pierre : « Un galant sans doute qu’elle attendait ». Ces filles, à qui on aurait donné le bon Dieu sans confession, s’entendaient à faire leurs coups en cachette.

Il s’esclaffait, secoué d’un gros rire.

À cette supposition, Marthe eut un mouvement de