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saient les coudées franches, le garçon, somme toute, leur plaisant.

Il reçut encore une lettre de Marthe, mais cela ne le toucha point, ne fit surgir en lui aucun remords. Comme elle pesait peu, cette petite fille, résignée à tous les abandons, dont le charme sentimental ne se révélait qu’à la longue, quand il la comparait à cette créature ensorcelante.

Il allait ainsi devant lui, en aveugle, sans se rendre compte du chemin parcouru.

Une nuit, il attendit Thérèse à l’angle du vieux mur. Elle ne vint pas. Quelque part, les heures tombaient lentement d’un clocher perdu dans la nuit, et chacune des vibrations sonores provoquait en lui un sursaut d’épouvante.

Que pouvait-elle faire ? Il voyait vaguement les formes des chalands accroupis, dormant sur l’eau, pareils à des bêtes échouées le long du fleuve. Les pas d’un promeneur attardé sonnaient dans le village sur le pavé des caniveaux ; alors les chiens aboyaient à bord des bateaux.

Minuit, une heure ! Il retenait son souffle, épiant les bruits qui palpitent dans la nuit. Ils prenaient à ses sens presque hallucinés, une ampleur terrifiante.

Il rentra à l’auberge, hanté de craintes. Quand il fut couché, il ressassa des idées tristes, et finit par tomber dans une agitation de cauchemar, énervante et fugace.

Thérèse ne vint pas, le lendemain. Il ne savait plus que supposer.

Et c’était en lui une sorte de honte, à se sentir ainsi maîtrisé par cette passion, lui, le beau garçon, habitué