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confusément. Elle avait un grand bonnet à fleurs comme on n’en portait plus, et, sur les épaules, un châle rouge, fulgurant, fleuri de palmes. Autour d’eux c’était une aube pluvieuse de novembre, les dernières feuilles des peupliers tombaient. Ils ne voyaient rien, la route blanche s’allongeait devant eux, les menait vers le bonheur. Des carrioles, conduisant des invités, les dépassaient ; et les gens au passage leur criaient des gaudrioles.

Et voilà qu’il se mit à penser qu’elle ne serait pas là pour la noce du grand garçon, dont elle était si fière.

Il répétait tout haut : Ma pauvre femme, ma pauvre femme ! avec cette voix lointaine des gens, qu’un souci obsède.

Pitoyable et courbé, il se hâta sur la grand’route, sur la route où toute sa vie avait passé, frêle chose battue des vents, lavée par la pluie, à peine plus lourde aux mains de la destinée que ces feuilles roulant devant lui.

Il allait, il allait, et près du ruisseau fangeux, près du ponceau d’une seule arche, près de la haie de troène, il n’y avait personne pour l’attendre, pour lui faire l’accueil d’un sourire.

Les jours passaient cependant et les noces devaient avoir lieu au commencement de septembre, les travaux de la moisson une fois terminés, alors que les paysans ont un moment de répit, dans le dur travail de la terre.

Pourtant ils devaient se séparer pour quelques semaines, parce que les deux pêcheurs allaient faire