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trappe furent submergés, mis en pièces... Ils disparurent littéralement, comme s’ils eussent été écrasés, engloutis sous une avalanche.

Comme en un rêve, je vis se redresser et tomber les miliciens qui, jusqu’alors, m’avaient retenu. Ils furent renversés, foulés, écrasés, étranglés, éventrés avec une animosité sauvage. Pendant quelques secondes, je pus entendre les ricanements, les glapissements horribles des quadrumanes qui vengeaient les infâmes traitements dont ils étaient les victimes depuis des siècles...

Ils se calmèrent enfin — lorsque leurs ennemis ne furent plus qu’une pulpe sans nom.

Pour la première fois depuis mon évasion, je me demandai si j’avais eu le droit de libérer ces brutes... À la vue des hommes-singes barbouillés de sang, leurs yeux jaunes hors de la tête, leur mufle plissé par une joie féroce, j’eus presque honte de moi qui avais trahi les hommes et m’étais allié avec ces brutes !

Comme je tournais la tête, mes regards tombèrent machinalement sur un ordre de service au bas duquel je lus le nom de Rair... Ce seul mot suffit pour balayer mes dernières hésitations et mes premiers regrets. « Périsse Illa, périsse la civilisation, pensai-je, pourvu que Rair meure ! »