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l’entendait plus. À la seconde suivante, le viscère se remettait à battre avec une violence formidable, qui secouait la poitrine du pauvre hère. Mais le malheureux restait toujours inanimé.

Le capitaine Mercier, un Nantais de vieille souche, ne possédait pas, parmi ses nombreuses qualités, celles de la douceur ni de la sensibilité. Ni celle de la patience non plus.

— Mousse ! appela-t-il. Va me chercher du coton et la bouteille d’esprit-de-vin dans ma cabine !

Le mousse, ainsi interpellé, s’empressa et revint bientôt avec les objets demandés.

Mercier prit une touffe d’ouate, la plaça entre les doigts de la main gauche de l’inconnu, qu’il maintint serrés au moyen d’un brin de fil de caret, puis, ayant versé sur l’ouate la valeur d’un demi-verre à liqueur d’esprit-de-vin, il y mit le feu.

L’ouate flamba. La chair des doigts du naufragé grésilla.

L’homme eut un violent sursaut. Il ouvrit les yeux, se dressa sur son séant et lâcha un furieux :

— Tonnerre d’enfer !

— Ah ! il parle ! Ça va ! s’exclama Mercier, qui prit dans sa grosse main les doigts environnés de flammes du malheureux et étouffa le feu.