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écrins, glissaient sur le parquet et allaient frapper les cloisons… Mais j’avais oublié leur existence !

» Ma torche électrique, que j’avais lâchée, ne s’était pas éteinte. Je la ramassai et m’approchai du hublot.

» Je pus voir passer devant moi des stries d’écume livide, des ombres… Je me rendis compte, sans aucune erreur possible, que le paquebot continuait sa descente vers le gouffre.

» J’étais bien perdu. Aucune puissance ne pouvait me sauver. Et pourtant, je suis ici !…

» Je suis un homme pratique… Oui, pratique, quand je ne bois pas… Je n’avais pas bu, cette nuit-là ! Ayant donc compris que j’étais perdu, bien perdu, je m’assis, ou, plutôt, je me couchai sur le plancher qui oscillait sous moi…

» Les grondements continuaient. D’un moment à l’autre, les parois d’acier de la chambre forte allaient se disjoindre, éclater sous la formidable pression qu’elles supportaient. Et c’en serait fini de moi.

» J’éteignis ma torche électrique ; je la mis dans ma poche et j’attendis…

» Malgré moi, je fixai le hublot, en face duquel j’étais étendu.

» J’y voyais passer, par moments, des phosphorescences étranges, des bouillonnements…