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LES MYSTÈRES DU CRIME

À présent, il s’expliquait l’énorme intérêt que la maîtresse d’Émile avait à faire relaxer immédiatement son amant.

Mais que s’était-il passé ?

— Revenons à l’incident qui nous occupe présentement, dit le commissaire de police.

— Très volontiers, reprit l’agent. J’étais parvenu à retrouver la piste de ce Sacrais, que seul je connais… Le gredin est adroit et c’est par hasard que j’ai pu le relancer… Donc, ce matin, je le suivais et n’attendais plus qu’un bon moment pour l’empoigner…

— Et vous l’avez manqué ?…

— Vous allez voir, monsieur Véninger, que le plus malin eût fait comme moi. Je le filais, lorsque près de votre commissariat, où j’allais le pousser, je le vis accoster une femme, celle précisément qui se débat dans l’autre pièce…

On entendait les plaintes affreuses de la malheureuse…

— Je m’approchai, continua Haroux, et j’entendis sans en avoir l’air leur conversation :

« — Tiens, c’est vous, monsieur Sacrais, dit la femme.

« — Oui, ma fille, mais dis donc, tu sors de chez le quart-d’œil

« — Émile a été pris, l’autre soir.

« — Je le sais bien… et puis ?

« — J’allais… voir le commissaire…

« — Pour le réclamer, n’est-ce pas ?… Tu es une bonne fille, ma foi. Ce qui m’étonne, par exemple, c’est qu’on t’ai laissé sortir.

« — Mais, monsieur Sacrais…

« — Au fait laissons cela, tes affaires sont les tiennes… quoique ton amant fût des nôtres. Il était de la bande à Général, tu sais ça, ma petite ?

« — Oui, c’est même bien malheureux…

Le policier fit part de ses réflexions au commissaire.

— À mon sens, et ça saute aux yeux, Sacrais, qui est justement chargé de la police de sa bande, crut que la maîtresse d’Émile avait fait des révélations pour sauver son amant de cœur… Et au fait c’est bien possible.

L’agent Haroux fit une pause.

M. Véninger ne répondit rien et laissa le policier poursuivre son récit.

— Donc, croyant que la fille l’avait dénoncé lui et les siens, Sacrais devait songer à se venger, et surtout à se débarrasser d’un témoin à charge. Je le vis emmener la fille chez un liquoriste, dont il devait bien connaître la maison. La maîtresse d’Emile le suivit assez effrayée. J’entrai après eux.

« — Nous allons prendre un petit verre avant de nous séparer, dit Sacrais ; qu’est-ce que tu veux ?