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LES MYSTÈRES DU CRIME

Il rompît le cachet et lut ces quelques mots :

« Mon cher Edmond,

« Vous viendrez chez moi ce soir et je vous emmène à l’Opéra. Mon légitime a eu la bonne idée de partir pour notre campagne de Noisy…

« Je rayonne. Où peut-on être mieux que loin de son mari… et près de son gros chien chéri, qui viendra prendre sa poupoule, à six heures, n’est-ce pas ?

« Et qui est-ce qui fera un joli petit dîner en tête-à-tête au Palais-Royal ?

« C’est nous !

« Apporte ton écharpe… Nous jouerons à la constatation des flagrants délits…

« Oh ! que c’est donc solennel !

« Non, va, laisse-la au clou, ça vaudra mieux.

« Je veux te parler de cette grosse affaire Caudirol. Tu me conteras ça, en me faisant bien peur.

« Je t’embrasse, vilain.

« Caroline. »

M. Véninger était un galant commissaire, on peut s’en convaincre par cette missive révélatrice.

Nous ne devons pas passer sous silence ses amours qui influeront curieusement et d’une façon inopinée sur la marche des évènements que nous retraçons.

La lettre ne produisit pas l’effet que l’on aurait pu en attendre.

Le commissaire de police eut un geste de mauvaise humeur. Il était entièrement absorbé par l’affaire Caudirol. Tout ce qui le dérangeait de cette préoccupation était mal venu.

— Il faudra cependant que j’y aille, dit M. Véninger avec dépit.

Et il ajouta à part lui.

— Je vais prendre sur moi de faire arrêter Caudirol. Ce sera un vrai coup de foudre… D’autant plus que je donnerai à mes agents son signalement, mais non pas son nom. Il n’est que juste que le mérite de cette capture me soit attribué, à moi seul.

Il se frotta joyeusement les mains.

Dans son imagination de policier, il se voyait chef de la sûreté à brève échéance.

C’eût été la réalisation de son rêve le plus doux.

Une violente rumeur, des trépignements et des hurlements retentirent