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LE DOCTEUR-NOIR

— Ah ! bonsoir… et à une autre ! fit le policier en donnant le signal de la retraite.

Les agents suivirent leur collègue, et la porte se referma.

Par bonheur, on n’avait point fait appel au témoignage des patrons qui se tenaient à distance et n’avaient point prêté d’attention à la perquisition chez la « Mère Vengeance. »

La Sauvage l’avait échappé belle, mais elle était hors de danger.

Elle alla vers la vieille et l’embrassa,

— Tu m’as sauvée, lui dit-elle. Désormais tu ne me quitteras pas. La misère n’existera plus pour toi…

La nuit s’écoula rapidement et sans sommeil pour les habitants de l’hôtel.

Lorsque les premières lueurs du matin filtrèrent à travers les fentes de la porte, la Sauvage se disposa à partir.

La vieille Italienne la regardait.

— Me feras-tu retrouver le prêtre… l’assassin de ma Pitchounette ? demanda-t-elle enfin, avec une expression d’angoisse affreuse.

— Oui, promit la Sauvage. Viens avec moi…

Marita eut un éclat de rire strident. Elle se releva d’un bond et de sa voix chevrottante elle chanta d’un air de triomphe son refrain habituel :

Ma Pitchounette
Sera vengée,
Ma Pitchounette
Sera vengée !

La Sauvage l’entraîna dehors et passa devant le bureau de l’hôtel sans être remarquée.

Aussitôt sortie, elle s’orienta.

Une marchande à la toilette était occupée à retirer les volets de sa boutique.

La maîtresse de Caudirol jeta un coup d’œil sur les vêtements misérables de la vieille femme et, prenant son parti sur-le-champ, elle s’adressa à la revendeuse.

— Il faudrait m’habiller proprement et des pieds à la tête cette bonne dame.

La marchande s’empressa de faire servir ses clientes…

Quand la Sauvage sortit de la boutique avec l’Italienne, cette dernière était convenablement vêtue. On eut dit la mère et la fille.

Les deux femmes descendirent la rue Gay-Lussac.

La Sauvage se rendait de ce pas chez madame Poivre-et-Sel, près de la Madeleine.