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LES MYSTÈRES DU CRIME

Haroux s’approcha du docteur.

— Faites comme moi, lui glissa-t-il à l’oreille. N’avouez rien !

Le médecin haussa les épaules.

— Adieu ! dit-il en se laissant aller de nouveau au cours de ses pensées.

La vérité, c’est que la police, voyant que le Docteur-Noir était invulnérable, avait fait relâcher son agent.

On désespérait de faire parler le prisonnier.

Le policier était à peine sorti de la cellule que la porte s’ouvrit de nouveau.

On venait chercher le Docteur-Noir.

— À l’instruction ! cria un surveillant.

— Encore ! fit le prévenu.

Toutes les souffrances morales, toutes les humiliations qu’il avait dû subir depuis son incarcération lui revenaient en foule à la tête.

Arrêté au cimetière du Père-Lachaise, devant le cadavre du gardien Bonnasse, il avait été dirigé au poste voisin. De là, il avait été envoyé au Dépôt, où il avait été enfermé cette fois dans une cellule du rez-de-chaussée.

Puis le jour même il passait devant un juge d’instruction qui, sans aucun interrogatoire préalable le faisait transférer à Mazas.

Là, en compagnie de deux individus chargés de le surveiller, il n’avait pas eu la consolation de penser librement et de se recueillir.

Cette vie à trois dans une cellule de prison, cette promiscuité continuelle, toutes ces tortures physiques et morales l’exaspéraient.

Le malheureux enviait le sort des autres détenus qui avaient chacun leur cellule.

Il s’était renfermé dans un mutisme farouche, et il attendait impatiemment l’heure de son jugement.

Le Docteur-Noir pensait en avoir fini avec les constations légales et l’instruction. Il éprouva un sentiment d’abattement profond quand on vint lui donner l’ordre de s’apprêter pour se rendre chez le juge d’instruction.

Il n’avait pu s’habituer encore aux mille humiliations de la vie de prisonnier.

Néanmoins il procéda à quelques détails de toilette et quitta sa cellule après avoir mis son chapeau.

Il traversa la galerie de la sixième, division et, précédé d’un gardien, il arriva au rond-point central d’où partent les galeries à trois étages de la prison.

Dans un bureau vitré, sur le toit duquel était aménagé une sorte de chapelle, se tenait le sous-brigadier.