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semblent épuisées et connaître leur fin, tandis que dans les arts voisins un mouvement se produit, nouveau, envahisseur de la Littérature même sans, pourtant, passer leurs propres limites[1]. Enfin les Religions, immémoriales pierres angulaires de toutes Fictions, s’effritent, tremblent sur leurs vieilles assises, vont périr et il semble voir descendre sur le monde un crépuscule annonciateur d’une nuit plus sombre que celle du Moyen-Âge, avec la complication et la complicité des sagacités inutiles d’une expérience qui n’est que du désenchantement.

À l’imminence du désastre les Poëtes, comme c’était leur seule défense, ont instinctivement opposé une récurrence logique aux Origines. De cette atmosphère factice et lourde qui les paralyserait ils se sont dégagés vers la Nature : et c’est pourquoi un monde d’artifice leur a reproché d’être artificiels. Ce n’est qu’une illusion de détail dans l’ensemble des illusions d’une société où tout est renversé, qui croit que son mal est de savoir trop, s’imaginant posséder en masse la science de quelques têtes d’exception, alors précisément que la masse a perdu le sens des plus élémentaires notions, le sens primitif de l’ordre et le sens de la destination finale.

On a imaginé un nombre incalculable d’essentielles bagatelles qui obscurcissent le fond unique et réel de toutes choses. En toutes choses on met,

  1. Voir : III, Influences nouvelles.