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La première Revue Indépendante est l’œuvre de Félix Fénéon qui avait déjà fait la Libre Revue, moins importante. Le principe ancien d’un assemblage étranger à toute préentente de doctrines y présidait. La seconde série de la Revue Indépendante, magazine de littérature et d’art, est plus significative. Elle prétendait rester étrangère aux « vaines agitations décadentes », mais là n’est pas son vrai sens. D’abord elle fut dirigée par Dujardin et Fénéon, et à peu près écrite par Téodor de Wyzewa. Puis Gustave Kahn y entra, l’absorba. Téodor de Wyzewa disparut, Gustave Kahn prit la direction de cette revue où, chaque mois, pendant près d’un an, il donna l’exemple ou la théorie, les deux parfois, d’une littérature très personnelle[1]. — D’autres recueils ont lieu ; à peine et c’est tout. — Un seul, le Décadent, mérite d’être nommé à cause de son excès d’être grotesque et qui fait regretter d’y rencontrer parfois des noms chers, tel celui de Laurent Tailhade. Mais cet excès a lui-même sa valeur démonstrative. Ce qui fait cette petite feuille

  1. Aujourd’hui, chez l’éditeur M. Savine, sous la direction de M. de Ryon, la Revue Indépendante combine, dirait-on, le système monarchique avec le système démocratique. Elle accueille sans esprit de secte tout ce qui porte la marque du talent, mais confie à un critique annuel le soin d’indiquer le sens véritable du périodique. Cette combinaison, qui a tous les torts et tous les mérites de chacun des deux systèmes, débute à merveille par les sagaces et arbitraires analyses de M. J.-H. Rosny, critique pour la première année. — La Revue Indépendante est assurément aujourd’hui la principale expression de la jeune littérature.