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de l’Ode. M. de Banville a montré dans ses vers et expliqué dans son Petit Traité de la Poésie française que la Poésie est, d’essence lyrique et que la Rime est la synthèse du Vers. Il a dit aussi et prouvé que le Drame doit être une ode dialoguée. Quoique tel et telnovateurs actuels semblent l’avoir oublié et quoique, sans doute, il faille féconder la reforme accomplie et la poursuivre selon la nécessité de toujours davantage libérer l’Expression en deçà, bien entendu, des bornes infranchissables, je crois que l’Art Intégral devra beaucoup au Maître qui, lepremier, formula ces deux lois. Il a, mieux que personne aussi, préciséles rapports de la Vérité et de la Fiction, indiqué dans quelle mesure les données de la vie doivent s’enrichir des conquêtes de l’Imagination et, ce double but de l’Art, réaliser le Rêve par la Vie, embellir la Vie par le Rêve : « Ce double but : faire oublier la Vie et la représenter cependant ; car nous ne pouvons nous intéresser à rien qui ne soit pas elle, et, d’autre part, nous ne saurions être réjouis si nos soucis ne sont magiquement dissipés et mis en fuite par la toute puissante Illusion. » Et ailleurs, exprimant la nécessité d’une spiritualisation des objets dans l’œuvre d’art : « Nul objet matériel ne s’adresse directement à notre âme, et notre âme n’est subjuguée que par ce qui s’adresse directement à elle. » Il sait que tout est dans la Beauté, que l’utilité d’un poëme est d’être beau. S’il n’a formelle-