quelque meurtrier, saisit son épée et tua sa maîtresse. Cet horrible spectacle fut depuis constamment devant ses yeux ; l’ombre le poursuivait sans relâche et il appela en vain à son aide et les dieux et les exorcismes des prêtres.
» Le poëte qui choisit dans l’antiquité une telle scène pour se l’approprier et en tirer de tragiques images doit avoir un cœur déchiré. »
Ce qu’il y aurait d’odieux dans le fait par Gœthe de prêter l’autorité de son grand nom à ces calomnies légendaires est un peu atténué par le silence de Byron. Accusé de meurtre, il ne protesta point. Il ne lui déplaisait pas de laisser s’accréditer autour de sa gloire ces fables sanglantes. — Le goût inné du caractère anglais pour le malheur ne suffit pas à nous expliquer cette disposition chez Byron : elle a chez lui un accent personnel où presque tous les poètes du même instant vont reconnaître l’écho magnifié de leur propre cri. Elle ne s’explique que par la mode de révolte de cette génération. Or, au fond de cette révolte il y a peu de chose : il y a surtout les déclamations de Rousseau.
Il y a ses deux propositions, dont l’une empoisonne l’autre : l’orgueil de naître bon s’est tourné en vanité délétère pour l’homme dépravé par la société. Voilà tout le bagage de Child-Harold et toute la cargaison de la barque de Lara. « Nous serions bons loin de la société : fuyons-la ! » Voilà ce qu’ils disent, et ils croient la fuir, dans l’espace et dans le temps, loin de leur patrie