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le Roland Furieux, etc. : pourquoi les en tirer ? C’était chose faite, c’était l’œuvre, aussi bien que l’histoire du passé, quand le Grand Siècle commença, et sa grandeur consista surtout en ceci qu’il eut l’intuition très sûre des conditions essentielles de l’Art moderne, qui sont de saisir, à sa date contemporaine, l’éternité (qu’on me pardonne d’employer ce mot dans un sens relatif) de la vérité humaine.

Bossuet et les Docteurs, Racine et les Poëtes manifestèrent cette intention dans les deux voies où les entraînaient les impulsions diverses qu’ils personnifiaient, — l’impulsion divine et spiritualiste qui prit à sa date (essor du Catholicisme) et aux souvenirs du Moyen-Âge la couleur chrétienne, — l’impulsion humaine et sensualiste qui prit à sa date (lendemain de la Renaissance) et aux souvenirs de l’Antiquité la couleur païenne. Mais de l’une à l’autre des deux impulsions, de l’un à l’autre des deux courants, il se fit des échanges qui formèrent le grand fleuve d’unité classique. La langue que parlèrent les Docteurs resta marquée par l’éducation antique, fut grecque et latine ; l’imagination des Poètes resta marquée par l’éducation moderne, fut chrétienne. Dans les livres de ceux-là et jusque dans la chaire, l’enseignement de la Théologie se souvient d’Athènes et de Rome ; sous la plume de ceux-ci et jusque sur la scène, le sens sacré des fables d’Homère s’atténue, s’efface, s’anéantit pour ne laisser plus subsister que l’âme-même de l’hu-