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à l’index. — Même au fond de cette injustice persiste la vraie grandeur de ces génies : elle consiste en l’exercice qu’ils ont fait de leur faculté de penser.

L’objet de leur pensée et le résultat même sont ici secondaires. Il suffit de constater, pour leur accorder le profond respect qu’ils méritent, que les hommes du XVIIe siècle pensèrent purement, sincèrement et hautement comme jamais depuis quinze siècles on n’avait pensé. Pourquoi se laisse-t-on offusquer par la livrée chrétienne qu’ils portent, ces hommes de bonnes raisons et de bonne foi ? Pourquoi, dans notre âge sceptique, accepte-t-on si mal volontiers de se souvenir qu’ils prirent gloire à servir la messe ? Pourquoi plutôt ne se rappelle-t-on pas en quelle caduque enfance végétait la Raison, à la veille du jour où ils se levèrent ? Non pas que j’oublie, à mon tour, le génie de Saint-Thomas et de Paracelse, les Pères de l’Église et les Alchimistes, ces rayons spirituels émanés de deux divers foyers de clartés pour converger à la même illumination du monde. Ils vivifient le XVIIe siècle lui-même, où Bossuet tire sa principale force d’être fidèle aux doctrines de Saint-Thomas, où Descartes se fait initier aux mystères des Rose-Croix. Mais enfin, jusqu’à Bossuet, Descartes et Racine, l’action de penser reste le spécial apanage de quelques mystérieux esprits, n’est point caractéristique de l’époque et de la race. Ce grand frisson de manifester la vérité (chrétienne) de Dieu, de trouver