Page:Moret - L’emploi des mathématiques en économie politique.djvu/86

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

faire figurer, pour la première fois croyons-nous, dans la détermination des prix de véritables courbes de demande et d’offre représentant les variations de la demande ou de l’offre d’une marchandise en fonction de son prix[1].

Malgré l’intérêt qu’elles présentent, malgré la réputation de leur auteur comme mathématicien, les Recherches, venues avant leur heure, passèrent complètement inaperçues : elles ne furent mentionnées ni dans la bibliographie de l’Histoire de l’économie politique de Blanqui ni dans le Répertoire général d’économie politique de Coquelin, ni même dans le Dictionnaire de l’économie politique publié par Guillaumin. Aussi, A. Cournot, découragé par cet insuccès, ainsi qu’il le dit lui-même, reprit-il en 1863 l’exposé de ses conceptions économiques, en les dégageant de toutes équations, dans un livre intitulé Principes de la théorie des richesses, qui fut du reste dans la suite jugé bien inférieur à sa première œuvre, dont on finit en effet par reconnaître la réelle valeur lorsque L. Walras et W. St. Jevons eurent attiré l’attention sur elle : le premier, en exprimant publiquement le regret que justice n’ait pas été rendue à celui qu’il considérait comme son maître, dans un mémoire qu’il présenta en 1873 à l’Académie des sciences morales et politiques, et dont J. Bertrand prit prétexte pour émettre sur l’ouvrage de A. Cournot des critiques qui, portant à faux, donnèrent lieu aux discussions dont nous avons eu précédemment l’occasion de parler ; le second, en rendant, dans la

  1. Il est intéressant de noter à ce propos que dès le xviiie siècle G. Ortes, dans son Calcolo sopra il valore delle opinioni umane, avait illustré l’exposé de ses idées avec des courbes qu’il s’était, il est vrai, borné à décrire minutieusement, sans les tracer. (Dictionary of political economy de R.-H. Inglis Palgravee siècle, vol. III, Londres, 1899, p. 44.)