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science qui en est la raison d’être. Cependant, si A. Cournot ne peut guère être considéré comme le fondateur de l’économie pure, il est incontestablement le plus considérable de ses précurseurs, et ses Recherches sur les principes mathématiques de la théorie des richesses, publiées à Paris en 1838, sont très importantes et très remarquables surtout pour l’époque à laquelle elles ont été écrites.

Dans cet ouvrage, duquel il a éliminé « les questions où l’analyse mathématique n’a aucune prise »[1], A. Cournot — comme la plupart des économistes mathématiciens qui n’ont pas su abandonner toutes visées pratiques pour se livrer à des études exclusivement scientifiques dans le seul but de savoir — s’est proposé d’élaborer une théorie de la valeur ou de la détermination des prix. Après toute une série de considérations plus ou moins philosophiques sur la valeur, et un exposé de la question du change qui ne semble pas présenter de grands caractères d’originalité, il a abordé cette théorie par l’examen du problème dont la solution est le plus directement accessible aux mathématiques, celui du monopole. Supposant connue expérimentalement la « loi du débit » ou « de la demande » d’une marchandise en fonction décroissante de son prix de vente uniquement, il a cherché la grandeur de ce prix la plus avantageuse pour un monopoleur, d’abord dans le cas où les frais de production sont négligeables (eau minérale naturelle), et ensuite dans celui où ces frais sont appréciables (eau minérale artificielle ou produit pharmaceutique de composition secrète ; en se préoccupant en outre de l’influence de l’impôt sur le coût de ces marchandises. Puis, du cas où un seul individu

  1. Recherches, préf. p. xi.