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publication dans les Cambridge philosophical transactions[1] valu à W. Whewell une certaine célébrité, n’offrent en effet, comme l’ouvrage du lauréat de l’Institut, que des traductions en symboles algébriques sous le prétexte qu’elles traitent de quantités, de théories économiques préexistantes. Ces traductions se différencient cependant de celles de N.-F. Canard en ce que W. Whewell a repris les idées de spécialistes autorisés au lieu d’adopter tout simplement, comme son prédécesseur, celles qui avaient ordinairement cours autour de lui ; mais cette différence ne parait pas suffisante pour empêcher de telles productions d’être, les unes comme les autres, de véritables non-sens — selon la forte expression de W. St. Jevons[2].

Antoine-Augustin Cournot est le premier économiste qui ait essayé de faire une œuvre mathématico-économique réellement constructive, et d’arriver « de manière évidente à la connaissance des faits en partant de l’ignorance de ces mêmes faits »[3], c’est-à-dire qui ait réellement employé les mathématiques comme moyen d’investigation au lieu de se borner à les utiliser pour traduire ou pour commenter des théories plus ou moins préconçues. Aussi, la plupart des auteurs ont-ils l’habitude de présenter cet éminent mathématicien comme le fondateur de l’économie pure, bien que, en réalité, il n’ait fait état dans son œuvre ni du principe de l’utilité finale, qui fut l’occasion de la naissance de cette science, ni du fait de la mutuelle dépendance économique (dont il avait pourtant nettement con-

  1. Vol. III (1829), pp. 191-230 ; IV (1831), pp. 155-198 ; IX (1850), pp. 128-149 et 2e part., pp. 1-7 (Ces deux derniers mémoires ont été traduits en italien dans la Biblioteca dell’economista, 3e sér., vol. II, pp. 1-65).
  2. Théorie... [p. 91], préf. 2e éd., p. 21.
  3. W. St. Jevons, Théorie... [p. 91], préf. 2e éd., p. 28.