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Avant de rechercher quelles sont les conquêtes dont le mérite doit être attribué aux procédés mathématiques, il n’est pas inutile, croyons-nous, de préciser le sens que nous entendons donner au mot conquêtes. Comparant, à la suite de Huxley, les mathématiques à un moulin, bien des économistes ont en effet posé en principe qu’elles ne sont pas susceptibles de constituer un instrument de découvertes, parce qu’elles ne peuvent rendre que ce qu’on leur a fourni. Or, cette manière de voir nous semble absolument inacceptable étant donné que l’homme ne crée jamais rien au sens absolu du mot, et que tous les travaux des astronomes, par exemple, depuis tant de siècles, n’ont eu d’autres résultats que de préciser les notions que chacun possède dès qu’il a tourné ses regards vers le ciel. Aussi considérerons-nous comme des conquêtes des procédés mathématiques toutes les découvertes dues à leur emploi, sans examiner si elles se rapportent à des vérités plus ou moins directement connues précédemment.

Cela étant, pour découvrir la contribution apportée par l’emploi des mathématiques à l’économie politique, nous n’avons qu’à nous reporter aux quelques considérations que nous avons développées dans le précédent chapitre. Nous avons vu en effet dans ce chapitre que ce qui rend indispensable l’emploi des mathématiques en économie politique, c’est la complexité des problèmes qui se présentent dès que l’on veut aborder l’étude du phénomène économique dans son entière complexité, l’étude de l’équilibre qui tend à s’établir entre les différents facteurs économiques. Or, il est évident que si les économistes mathématiciens ont pu être assez heureux pour sortir des chemins battus par les économistes littéraires, ce doit être dans les régions où seul l’appareil mathématique leur a permis d’aborder ; et c’est effectivement l’étude de l’équilibre économique qui leur a