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viennent déclarer que l’emploi des procédés mathématiques n’empêche pas la valeur des déductions de rester subordonnée à celle des hypothèses[1]. Mais avant de conclure de ce défaut d’infaillibilité à la condamnation des procédés mathématiques, il faut rechercher au préalable l’importance de ses manifestations, c’est-à-dire des erreurs reprochées aux économistes mathématiciens[2].

Or, une première observation s’impose immédiatement du fait que ce sont les économistes mathématiciens eux-mêmes qui, par leurs discussions et leurs polémiques, ont donné à penser que leurs œuvres devaient receler des erreurs : c’est que, dans la mesure où elles existent, ces erreurs ne peuvent fournir que des arguments ad hominem, qui ne prouvent même pas nécessairement l’incapacité de ceux qui les ont commises si l’on songe que des d’Alembert, des Laplace, des Poisson se sont parfois entièrement fourvoyés, et dont on ne saurait, dans tous les cas, faire état contre l’économie mathématique en général.

D’autre part, l’analyse des discussions et des polémiques dont il s’agit montre — ainsi que nous aurons l’occasion de le voir pour les principales d’entre elles — que les controverses qui en font l’objet ne portent que sur les positions des questions et non sur les solutions, de telle sorte qu’elles laissent hors de cause l’emploi des procédés mathématiques, dont on ne peut réclamer rien autre chose que la certitude des raisonnements.

  1. A-M. B., Grande encyclopédie, article Économie.
  2. Il ne saurait, bien entendu, être question ici des élucubrations à allure plus ou moins mathématique, mais au demeurant complètement fantaisistes, telles que les lois de Davenant et de Gregory King, de Malthus, voire de von Thünen, dont les adversaires de l’économie mathématique se plaisent parfois à rappeler l’inexactitude, sans paraître se douter qu’elles constituent des créations purement littéraires.