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l’équilibre économique se trouve réalisé, sans modifier les caractères généraux de cet équilibre. Or, comme nous le rappelions au début, il n’y a de science que du général. Aussi, en présence de l’infinie complexité du monde économique, les économistes mathématiciens ne se sont-ils pas montrés plus embarrassés que les physiciens en présence de la complexité non moins grande du monde physique : négligeant, provisoirement tout au moins, les facteurs secondaires de l’ordre économique, ils n’ont fait porter leurs recherches que sur les faits et gestes d’un homme idéal — l’homo economicus de M. Pantaleoni — se comportant comme le ferait la moyenne des hommes, mais incapable de se laisser influencer par les circonstances accidentelles, c’est-à-dire faisant, à l’exclusion de tous autres, les seuls actes sans lesquels la vie économique cesserait d’exister, de même que les physiciens font porter leurs études sur les propriétés de solides ou de fluides parfaits, et qu’ils font souvent abstraction dans leurs travaux des frottements et des déformations qui viennent superposer leurs actions à celles qui donnent naissance aux phénomènes étudiés proprement dits. Mais cette manière de procéder a paru tout à fait inacceptable aux auteurs qui voyaient, dans la complication des phénomènes économiques, un obstacle insurmontable à l’emploi des procédés mathématiques, et ils n’ont pas hésité à proclamer qu’établies sur des bases aussi simplifiées, les théories mathématico-économiques étaient totalement dépourvues d’intérêt parce que inapplicables à l’étude des cas concrets. Ce n’est d’ailleurs là qu’une manifestation de la vieille querelle que, dans tous les domaines des connaissances humaines, les praticiens cherchent sans cesse aux théoriciens.

L’emploi des mathématiques en économie politique n’a nullement pour but en effet, comme semblent se