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suivre les raisonnements mathématico-économiques. Mais, malheureusement, pour louables qu’elles soient, de telles tentatives ne semblent pas susceptibles d’être couronnées de succès. Il n’est pas possible en effet de présenter sous une forme simple des théories compliquées, et, d’un autre côté, on ne peut guère espérer enseigner en quelques pages une science dont l’étude demande en général de longs mois[1] ; sans compter que s’il n’y a aucun intérêt (peut-être pourrait-on dire au contraire) à aborder de bonne heure l’étude de l’économie politique, il n’en est pas de même pour les mathématiques, ce qui explique sans doute que la plupart des économistes mathématiciens furent des hommes, des ingénieurs le plus souvent, qui avaient fait des mathématiques avant de se préoccuper des questions économiques.

D’ailleurs, quand bien même des ouvrages appropriés seraient capables d’apprendre rapidement à leurs lecteurs à déchiffrer les mathématiques, « comme un voyageur apprend à comprendre une langue étrangère sans prétendre l’écrire »[2], le secours de tels ouvrages n’assurerait pas encore le succès de l’emploi des mathématiques en économie politique. Pour tirer de cet emploi tout le rendement que l’on peut se croire, à tort ou à raison, en droit d’en attendre, il ne s’agit pas

  1. En fait, l’Économie politique mathématique de Laurent ne présente qu’une parenté extrêmement lointaine avec les œuvres d’économie mathématique dignes de ce nom, et si un livre, comme l’Introduction de MM. Leseine et Suret, est à même d’offrir des exemple d’applications des mathématiques à l’économie politique du plus haut intérêt… pour ceux qui sont déjà familiarisés avec les procédés de l’analyse, nous craignons fort qu’un tel ouvrage ne puisse suffire à éclairer ceux auxquels ces procédés sont étrangers, d’autant plus que ses enseignements ne sauraient atteindre aux connaissances nécessaires à l’intelligence des récents travaux d’économie mathématique.
  2. Ch. Gide, Revue d’économie politique, numéro de novembre-décembre 1911.