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VI


Un mois environ s’était écoulé depuis son arrivée à Mondorf, et aucun changement sensible ne se manifestait dans la santé de Fernand Darcier. Même il se sentait souffrir davantage. Depuis quelques jours, à une indifférence qui confinait souvent à l’insensibilité et qui le laissait quelquefois une journée anéanti, la tête et le cœur vides, sans une pensée, sans un désir, avait succédé l’intermittence des accès d’une douleur aiguë, qu’il ressentait dans toutes les fibres de son être sans pouvoir cependant en préciser exactement le siège.

Tout en souffrant, il bénissait cette intensité du mal, qui le ramenait à la sensation de la vie et contre laquelle son corps se raidissait dans un effort de réaction. Il s’en était ouvert au médecin, et M. Petit, qui étudiait de très près, sans y trop laisser paraître, la marche du traitement, se réjouissait de ce retour d’activité.

Voyant le pauvre garçon livré seul, sans famille et sans amis, à sa triste destinée, il s’était pris pour lui d’une généreuse pitié et souvent lui consacrait, en dehors des heures réservées à la médication du malade, quelques moments de loisir. Fernand haletait après ces moments-là, qui étaient pour lui une