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n’est pas monté en chaire, sa charge ayant absorbé tout son temps au profit de l’administration de son diocèse. Pensez ainsi s’il est curieux de savoir comment il refera son premier sermon !

En tout cas, nous en aurons tout le profit, nous autres, car le chanoine est un esprit d’élite et un fin causeur.

— Je me promets d’aller l’entendre. Oui, vraiment, Monsieur le député, c’est là une excellente recrue que vous avez conquise pour nos baigneurs et je vous en sais un gré infini.

— De grâce, Monsieur le ministre, ne me remerciez pas. C’est un devoir de reconnaissance que j’accomplis, et ma dette n’est pas payée : je ne me tiens pas quitte à si bon compte.

Mais, pardonnez-moi ; je bavarde et vous retiens sans penser que votre temps est précieux.

— Pas le moins du monde, cher Monsieur. Je suis venu en flâneur aujourd’hui, et je me félicite d’être assez favorisé pour vous avoir rencontré au cours de votre promenade. Si vous le permettez, nous la continuerons ensemble, en causant.

Ce que M. Dubreuil avait dit de son ami le chanoine, on pouvait à coup sûr le dire de lui : c’était un fin causeur. Le temps un peu bizarre de ce mois de mai ayant mis la conversation sur le chapitre de l’agriculture, dont on pouvait craindre qu’elle souffrît du retard de la végétation, l’agronome aussitôt reparut sous l’habit du baigneur. Non pas l’agronome pédant qui parle en formules et en axiomes ; mais un homme d’expérience connaissant le pourquoi et l’origine des choses dont il parlait, et les analysant de telle sorte que le plus indifférent fût demeuré sous le charme.