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Quel mal faisait-elle ? Aucun. Dès lors, à quel propos cette intervention de son père ?

Pourquoi cette étrange et froissante question, ensuite :

— « Que te disait-il ? »

Rien qui ne pût être rapporté. Que supposait-on ?…

Le malheur fut que M. Dubreuil, encore sous le coup de la colère involontaire qui l’avait envahi, s’oublia au point de faire à Raymonde une semonce en règle. Où donc avait-elle appris à se tenir ainsi envers un jeune homme qu’on ne connaissait point, après tout ?

Cela ne ressemblait en rien aux sages habitudes de réserve qu’on s’était efforcé de lui inculquer. Sans être fort sévère, on pouvait trouver cela parfaitement inconvenant. Eh ! vraiment, ne dirait-on pas que M. Darcier fût fort avant dans son intimité et dans ses sentiments !…

Tout ceci avait été dit trop bas pour que personne autre que Raymonde eût put l’entendre. Même Marcelle, absorbée dans ses illustrations, était demeurée dans le rond de clarté, tombant des abats-jour du lustre, ne s’était pas aperçue de l’entrée de M. Dubreuil.

Celui-ci s’en félicita au fond de lui-même, sa colère injuste tombant maintenant et faisant place dans son cœur à un commencement de regret. Il se dirigea vers l’enfant, l’appela.

— Petit père ! s’écria Marcelle en rejetant son livre. Je ne t’avais pas entendu venir.

— Il est l’heure de dormir, ma chérie, dit M. Dubreuil, et je venais te dire bonsoir. Embrasse-moi, veux-tu ?

Et quand il l’eut embrassée, la remettant aux mains de sa fille :