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ainsi le préjugé ? C’était un ange, peut-être : on l’eût cru, sans doute, à voir de quel air d’admiration la considérait le jeune homme. Tandis qu’elle s’approchait de lui, la main tendue, elle répéta encore :

— Bonjour, monsieur Fernand !

Mais ce ne fut que quand elle fut arrivée tout près, contre lui, que Darcier trouva en lui-même la force nécessaire pour répondre :

— Bonjour, mademoiselle Raymonde !

C’est que, bien qu’il eût été naguère de très bonne foi lorsqu’il avait dit son prénom à Raymonde, il ne s’attendait pas à la voir s’en servir ainsi : s’il avait été en mesure de s’interroger sérieusement en ce moment, il se fût même avoué qu’il craignait de voir cet usage qu’elle en faisait, déplaire à M. Dubreuil.

Pourquoi ? Eh ! il n’en savait rien. Mais, depuis quelque temps, il s’était aperçu de la froideur que mettait le député à lui faire accueil. C’était, sans doute, l’antipathie inspirée par son air chétif et faible à cet homme de santé puissante…

Tandis que Darcier se tenait debout devant Mlle Dubreuil, embarrassé de savoir ce qu’il pourrait lui dire, le docteur faisait voir à M. Dubreuil les deux jeunes gens, debout l’un devant l’autre.

— Si la saison était d’un mois plus avancée, disait M. Petit, ce jeune homme serait guéri, et quelqu’un qui le verrait ainsi, causant familièrement à Mlle Raymonde, pourrait croire…

M. Dubreuil ne le laissa pas achever et, sans que rien justifiât une pareille sortie, il s’écria d’un air furibond :

— Marier ma fille à un poitrinaire, moi ?… Jamais !…