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Je n’avais d’autre but, en le faisant, que d’essayer de prévenir les chagrins et les ennuis que je prévois, et dont ce fatal amour qui s’est implanté dans votre cœur sera la source. Il est trop tard, je le vois : aussi j’y renonce.

Aimez, puisque telle est votre destinée : mais du moins n’allez pas oublier que vous n’avez aucune chance de voir jamais votre amour partagé, si vous ne travaillez pas opiniâtrement à vous guérir…

En ce moment un garçon de bains entra dans le cabinet du docteur, envoyé par M. Canon pour lui annoncer que quelqu’un se noyait à la pièce d’eau et qu’on aurait besoin de ses soins.

M. Petit s’empressa et trouva sur la berge du ruisseau, à l’enceinte du parc, un garçonnet d’une douzaine d’années étendu sans connaissance ; autour de lui, le régisseur avec des hommes de service et des curieux s’empressaient, lui donnant les premiers soins. Quand le docteur arriva, le gamin ouvrit les yeux, revenu à lui, et se mit à pleurer, redoutant un châtiment sévère, sans doute. Alors M. Canon raconta la scène du naufrage.

Le petit était venu jusqu’au bord de la pièce d’eau, escaladant la haie, et avait embarqué en tapinois dans une des nacelles pour faire une partie de canotage.

— S’il avait prévenu, n’est-ce pas, disait le bon régisseur, on aurait pu l’empêcher de choisir précisément cette mauvaise barquette, que tout le monde a été prié de laisser à la rive jusqu’après réparations. Mais il n’a rien dit, il a fait pour quitter le bord force rames et a été se perdre dans les liantes herbes des eaux profondes, où la barque a chaviré.