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elle aussi, fort gracieusement. Elle raconta la soirée de la veille : on s’était amusé ferme, mais la chaleur insupportable avait mis fin à la danse dès dix heures.

— Vous devez être bien fatiguée, mademoiselle, hasarda Fernand.

— Mais pas trop, monsieur ; même j’ai écrit, avant de me coucher, une longue lettre que je voulais voir partir ce matin.

Fernand tressaillit. Sa lettre, à lui aussi, venait d’être mise à la poste. Elle allait donc voyager de compagnie avec celle de la jeune fille : le même courrier emporterait au loin les secrets de leur cœur.

Au déjeûner, M. Dubreuil annonça à ses filles l’arrivée du chanoine Liévin, et décida qu’on irait à sa rencontre jusque Luxembourg. L’heure du tramway étant passée, il avait fait commander une voiture qui vint les prendre, peu d’instants après que les jeunes filles eurent achevé leur toilette. On partit.

La matinée s’avançait ; les grandes herbes ne brillaient plus de l’humidité de la nuit, mais le soleil leur donnait un autre éclat, plus chaud et plus durable, elle se nuançaient sous ses caresses ; elles prenaient des tons fauves et dorés, et frémissaient sous la chaleur comme elles l’auraient fait sous la brise. Parfois la verdure devenait plus vive, on approchait de quelque marais vague qui s’étendait mollement et sur le bord duquel des canards barbotaient, saluant la voiture au passage d’une volée de cuins-cuins vigoureux. La route, tantôt bordée d’arbres, tantôt courant au milieu de plaines découvertes, traversait çà et là quelque village. Les maisons de ces villages luxembourgeois s’étendent au loin, chacune entourée de son enclos, toutes