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devrions être, si l’on considère les très favorables conditions du milieu physique que nous avons hérité d’Espagne ; et pour les observateurs qui viennent ici ou qui étudient les conditions de notre territoire, la négligence que le gouvernement et le peuple apportent dans les investigations considérées, parmi les nations civilisées, comme de primordiale importance pour établir, sur des bases solides et inébranlables, les éléments de progrès du pays, est une cause d’étonnement constant.

Quand viennent des temps difficiles, on entend parmi nous des lamentations et des récriminations ; on lance des jugements téméraires, on tâtonne dans l’obscurité, et au lieu d’avancer d’un pas ferme, en se confiant en la décision que donne la pleine connaissance de l’origine et de la cause des difficultés qui ne sont jamais insurmontables, dans les limites du pouvoir de l’homme, nous nous contentons d’attendre commodément des jours meilleurs : espérance qui n’est que de la faiblesse et de l’apathie.

Nous oublions que si c’est une question d’honneur national que de défendre l’intégrité du sol natal, ce doit en être une aussi que de donner à ce sol toute sa valeur ; avec cela on évite le cas d’avoir à défendre son intégrité. Les États-Unis, sans armée permanente, sans flotte qui mérite ce nom en face de celles d’autres nations plus petites, sont en chemin d’être la première nation du monde par la connaissance qu’ont leurs fils du sol natal, et des ressources que leur procure le travail. C’est le secret du prodigieux développement de la nation que nous prétendons imiter. L’énergie, l’activité et la force nord-américaines ont leur origine dans la communion intime de l’homme avec la terre qui n’est pas ingrate s’il l’aime et l’arrose de sa sueur. Les États-Unis recueillirent l’héritage de l’Angleterre, et l’augmentèrent, au lieu de le gaspiller ; mais nous qui prétendons puérilement être leurs égaux dans le Sud, nous n’en pouvons pas dire autant. Nous avons été négligents, pour ne pas dire prodigues, avec notre héritage. Que de fois, nous qui nous sommes préoccupés de cet abandon aux moments où se discutaient nos frontières avec les voisins, le Paraguay, le Brésil, la Bolivie ou le Chili, avons-nous entendu des paroles comme celles-ci : « Pourquoi nous efforcer de défendre des territoires si lointains, si peu connus, si stériles (sans prendre la peine de savoir s’ils le sont en réalité), quand nous avons tant de terre