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1200 mètres au-dessus du niveau de la mer, et glisse doucement vers le sud dans la vallée formée par les cendres volcaniques. Le ruisseau affluent du Bio-Bio est plus rapide, bondit sur les roches de l’ancienne moraine frontale du grand glacier disparu, et se jette dans le beau fleuve qui a son cours principal à l’occident. Attirés par le beau paysage nous descendîmes la vallée voisine au grand galop, tant était douce la pente, et traversant le fleuve, nous nous dirigeâmes, sur des moraines et de superbes prairies jusqu’aux rives du Lac Guayetué. Ce lac étale ses eaux tranquilles à une grande distance, mais le soleil couchant ne nous permit pas de voir, ni de calculer son extrémité occidentale. Je pus cependant compter, depuis l’embouchure du fleuve, cinq ondulations ou cordons apparents, et le Volcan Llaimas qui les domine à l’ouest-sud-ouest. Peu après être sorti du lac, avant de tourner au nord, le Bio-Bio reçoit l’arroyo Rucunuco qui lui apporte le tribut des eaux du lac Ycalma, situé entre le lac Guayetué et le lac Aluminé ; le monticule de la Batea se détache isolé à l’orient de la rivière. Ainsi donc les eaux du Bio-Bio naissent à l’orient de ces chaînons andins, et les traversent ensuite pour se jeter dans le Pacifique. Cette dépression semble être le reste d’un grand bassin lacustre antérieur dont les derniers vestiges seraient les trois lacs cités : Aluminé, Ycalma et Guayetué. Les éruptions modernes ont formé de leurs laves le Cerro de la Batea, et ont comblé le lac primitif de leurs tufs, lesquels furent à leur tour détruits en partie par l’érosion de l’époque glaciaire dont on retrouve les traces dans les moraines du haut plateau. Ce plateau constitue le vestige le plus considérable de l’ancien lit du grand lac dans la seconde époque du développement des glaciers qui formèrent des moraines et dont les restes existent encore dans les cordons montagneux voisins. La basse vallée actuelle mesure plus de vingt kilomètres de l’est à l’ouest, et la population commence à y affluer, formée d’émigrants chiliens, qui s’éloignent de leur territoire, alarmés par les bruits de guerre, que répandent d’autres de leurs compatriotes afin d’acquérir ainsi, à vil prix, les champs ensemencés qu’abandonnent ceux qui croient en cette guerre aussi impossible que prophétisée sur tous les tons. Cet après-midi arrivèrent au Commissariat Wolff et Hauthal. Ils avaient fait un intéressant voyage et me fournirent les données générales dont j’avais besoin. Depuis l’estancia « La Argentina », ils avaient pénétré par la gorge de l’arroyo Pailahué, et sur le plateau et ses scories, s’étaient dirigés à l’ouest, traversant l’arroyo Manzano, et longeant les