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pement militaire de Ñorquin qui a passé aux mains de particuliers.

Le chemin serpente parmi des pâurages épais, et passe à côté d’une exploitation très gaie où nous voyons des plantes grimpantes couvrant les parois et les bords du toit des pittoresques ranchos ; des fleurs rouges de mauves animent le paysage, et un ruisseau dont la source jaillit parmi des roseaux et des cressons serpente au milieu de chétifs enclos de vaches, de chèvres et de porcs. Des femmes actives lavent du linge en chantant, et des hommes dorment sur le sol ; elles plantèrent sans doute les fleurs et les plantes grimpantes ; et eux héritèrent le rancho et les enclos de quelque vieux chef qui réunit là les animaux qui lui échurent à la répartition de la razzia (malon). Si l’indien a peu changé avec la destruction de l’aduar (campement), ses femmes par contre ont progressé ; il semble qu’aujourd’hui elles sont plus femmes ; elles rient déjà. Nous galopons depuis cet établissement jusqu’à Ñorquin où nous arrivons vers le soir, sur un sol excellent ; il y a des pâturages qui rappellent la Pampa près de Tandil, dans la province de Buenos Aires, et tous les côteaux voisins verdissent.

Le spectacle de Ñorquin fait faire de tristes réflexions ; des rues d’édifices en ruines, de belles casernes sans portes, des vestiges d’un puissant campement qui n’aurait pas dû cesser d’exister, mais toujours et partout le même défaut national : la négligence et l’ignorance de la valeur de la terre aux dépens du trésor commun.

Des centaines de mille piastres ont dû coûter ces constructions qui ne sont que des ruines, quand elles auraient pu être la base d’opérations d’un grand centre de production, étant données les conditions du sol, la bonté des terrains voisins et la proximité du Chili où conduisent de faciles chemins.

Une pareille situation aux États-Unis aurait été exploitée aussi tôt qu’elle aurait été découverte ; on aurait déjà fondé des villes ; la vallée serait traversée par des chemins de fer, et les sources thermales voisines de Copahué auraient une renommée universelle. Là se serait groupé tout le raffinement de la civilisation moderne, tel est le pittoresque et grandiose site où jaillissent les eaux miraculeuses dont la réputation attire déjà chiliens et argentins ; mais les thermes sont déjà une propriété particulière en vertu d’une concession nationale.

J’apprends à Ñorquin que le général Godoy doit arriver à Codihué ces jours-ci, qu’il cherche un endroit convenable pour établir le quartier général de la division du Neuquen, d’accord